« Et si on se le faisait face nord et sans les mains !? »
C’est avec cette punchline bien sentie que Stéphanie conclut le récit de mes dernières (més-)aventures. Elle voulait savoir comment s’était passée la partie subaquatique de mon reportage avec des démineurs à Tours. Elle n’a pas été déçue.
Pour l’histoire, la dernière fois que j’ai fait des photos immergées, j’ai noyé un boîtier à cause d’un mousqueton coincé. Mais après avoir séché un mois, le boitier s’est rallumé ! Je suis donc retournée travailler avec.
Je l’avais checké rapidement à mon atelier et j’avais remarqué qu’il surexposait sa mesure de lumière. Mais le reportage sur cette opération de déminage d’une bombe de 500kg est déclenché dans l’urgence. Il est trop tard pour louer du matériel, je ferai avec le matos disponible et je gèrerai les aléas. C’est bien pour ça que je suis photographe professionnel : je sais faire un peu plus que seulement appuyer sur un bouton !
Arrivée sur place, je découvre que les démineurs-plongeurs ne m’avaient pas menti : la Loire est claire, la hauteur d’eau assez faible… et y a du courant ! Ils m’attachent une ligne à leur ponton flottant, quelques mètres en amont de la bombe. Pas question de gêner leur travail : il y a 2 charges primaires qui doivent être désamorcées et retirées sous l’eau.
Je m’immerge au ponton, j’évalue la luminosité, je me mets à 800 ISO et choisis ma vitesse au travers du caisson. Je fais un test : surex. J’augmente drastiquement ma vitesse. Toujours surex, rien n’a changé. Quelque chose ne va pas. Je passe en manuel. Nouveau test. Et je comprends : mon obturateur est bloqué. Le boîtier m’indique d’autres valeurs mais l’appareil déclenche à 1/60s à pleine ouverture. Pour faire des images correctes, je n’ai plus le choix : seuls les ISO peuvent être changés.
Ainsi soit-il. Je travaillerai avec ce seul paramètre. Et je sais déjà que faire une photo à 1/60s, ballotée dans une machine à laver en cycle essorage sera un exercice de style.
Il faut pourtant y aller. #CaVaBienSePasser
Je me fais emporter, je reviens, je me contorsionne.. Au prix de nombreuses apnées, cramponnée à ma ligne ou à des blocs au fond pour tenter de me stabiliser : je réalise les images qu’on attend de moi.
Grâce aux particules en suspension dans le fleuve, la vitesse de 1/60 montre la force du courant. Et ça brasse. Les démineurs s’immergent deux fois ce jour-là, donc moi aussi. En fin de manip, je sors de l’eau, vidée. Mais dans la boîte, il y a ces photographies impossibles à refaire, celles qui étaient la seule raison de mon déplacement. Rien n’empêche !
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